Les fleuves sont le pétrole du Népal

Au Népal, une petite entreprise conçoit et réalise des petites installations hydroélectriques adaptées à la spécificité du terrain pour à fournir de l’électricité aux communautés locales.

Akkal Man Nakarmi est un ingénieur mécanique, originaire du Népal, qui travaille dans le domaine de la recherche et des études scientifiques dans les zones montagneuses. Son thème de travail est l’énergie hydraulique. Il est propriétaire d’une petite entreprise industrielle qui, depuis 40 ans, conçoit et réalise de petites turbines destinées à la production hydroélectrique et aux moulins à grains dans les régions montagneuses.

Dans les montagnes de l’Himalaya, l’accès à l’énergie électrique d’État est difficile, car ces régions sont très isolées. Cependant, l’eau y est abondante, ce qui a permis à la vaste expérience d’Akkal dans le domaine des microturbines de trouver à s’employer. Les petites centrales hydroélectriques qu’il conçoit sont très pratiques pour ces zones écartées, où il se rend toujours en personne pour travailler avec les communautés locales, lesquelles se montrent toujours disposées à coopérer pour améliorer leur niveau de vie.

Akkal Man Nakarmi explique : "Les Arabes ont du pétrole partout et ont des puits pour le pomper. De manière similaire, je constate que dans notre pays il y a de nombreuses rivières et ruisseaux, que l’on peut considérer comme le pétrole du Népal." Il s’est spécialisé dans l’utilisation locale de l’énergie hydroélectrique, à l’aide d’équipements construits et gérés par les gens des communautés. Il s’agit d’une solution qui intéresse potentiellement d’autres régions montagneuses dans le monde.

Il existe de nombreux types de turbines hydroélectriques qui peuvent être conçues en fonction des besoins des gens. Par exemple, si l’on a affaire à une faible quantité d’eau, mais qui tombe de très haut, on utilise un certain type de turbine ; d’autres types nécessitent suffisamment d’eau mais tolèrent une dénivellation plus faible – de sorte que selon les conditions spécifiques à chaque lieu, l’entreprise d’Akkal Man Nakarmi est en mesure d’adapter le modèle.

Nakarmi déclare encore : "J’ai pu observer que les habitants du Népal ont trois besoins fondamentaux : la nourriture, l’habillement et le logement. Pour satisfaire ces besoins, un quatrième élément est nécessaire, l’énergie, car sans énergie on ne peut rien fabriquer. Pour couper le bois, pour s’approvisionner en eau, pour moudre les céréales, pour réchauffer la maison en hiver, il y a besoin d’énergie, et la principale source d’énergie dans l’Himalaya est l’eau. C’est pourquoi j’ai conçu ces turbines." Nakarmi travaille tout autant pour les habitants de l’Himalaya que pour ceux des plaines, car tous disposent de sources d’énergie hydroélectrique. Dans les plaines les rivières sont plus larges ; dans les montagnes elles sont plus étroites mais leur débit est plus élevé et elles sont parsemées de cascades.

"J’ai commencé ce travail et ce commerce en 1960, quand j’avais 15 ans. Je conçois des turbines et je cherche également les financements nécessaires auprès de banques ou d’organismes financiers. J’explique aux gens comment fonctionnent les turbines et cette technologie dans les montagnes. Je leur parle également de l’importance de cette énergie, car sans électricité le travail augmente : l’hiver, le chauffage au bois remplit leurs maisons de fumée, à peine la nuit tombe-t-elle qu’il faut dormir, leurs enfants ne peuvent pas étudier le soir." Lorsque les communautés optent pour ce type d’énergie, Nakarmi assure le contact avec les financeurs et engage le travail en collaboration avec les habitants.

Le problème se pose du remboursement par les villageois de leur dette contractée auprès des banques pour la construction de l’infrastructure. Cet emprunt doit être remboursé en 7 ans et dans la plupart des cas, il s’agit d’un objectif très difficile à atteindre. Aujourd’hui, certains proposent la mise en place d’un coût mensuel d’usage de ces équipements, lequel serait destiné, une fois la dette remboursée dans son intégralité à la banque, à la maintenance de l’infrastructure.

En quelques occasions, des désastres naturels ont endommagé les équipements, mais plus ou moins 90 % d’entre eux fonctionnent de manière satisfaisante. "Nous avons installé 4000 turbines dans les montagnes. Chaque turbine sert à 10 maisons, c’est-à-dire que nous avons aidé autour de 40 000 familles", déclare fièrement Akkal Man Nakarmi.

L’entreprise de Nakarmi vérifie le bon fonctionnement des turbines grâce à des collaborateurs, qui voyagent pour s’assurer du fonctionnement de chaque unité. Parfois les usagers se rendent au siège de l’entreprise ou prennent contact avec elle pour une consultation.

Il s’agit d’une solution adaptée au problème de l’énergie dans les zones de montagnes difficiles d’accès.

Commentaire

La situation que connaissent les zones de montagne est spécifique, de sorte que les solutions aux problèmes innombrables que rencontrent leurs habitants doivent être créatives et adaptées à cette réalité. L’expérience d’Akkal Man Nakarmi permet d’utiliser la principale ressource de la région, l’eau, pour répondre à l’un de ses plus grands besoins : le manque d’énergie.

Dès lors que nous tenons compte de ce que nous avons sous les yeux, des ressources dont nous disposons, des solutions alternatives aux différents problèmes peuvent émerger. Les ressources naturelles représentent un potentiel pour l’amélioration de la qualité de vie des communautés, et une entreprise privée qui appuie ce type d’initiatives est un atout pour le développement soutenable de son pays.

Si les responsabilités relatives aux problèmes d’une région ou d’un pays sont prises en main collectivement, il est plus aisé de produire des changements réels. Il ne s’agit pas d’assumer des responsabilités qui devraient être du ressort d’une autre instance, mais de coopérer et d’être "socialement responsables" à l’endroit où nous nous trouvons. En ce sens, la contribution d’Akkal Man Nakarmi est d’une grande valeur pour le Népal et pour les autres pays pauvres.

Note

Fiche originale en espagnol : Los ríos son el petróleo de Nepal. Traduction : Olivier Petitjean.

SOURCE
 Entretien avec AKKAL Man Nakarmi, qui a participé à la seconde rencontre mondiale des habitants des Montagnes, Quito, 17-22 septembre 2002. Kathmandu Metal Industries Pvt. Ltd. Tel. : 977 1 259069 ; kmihp (at) ntc.net.np

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