Sur la destruction des zones humides au Mexique

, par  Olivier Deroche

Une décision de loi n’entraîne maheureusement pas les conséquences qu’elle devrait. C’est la cas aujourd’hui au Mexique avec la réforme de la loi des eaux nationales.

Par Olivier DEROCHE

On y croyait, ils l’avaient dit. Le 29 septembre 2011, une réforme du sénat dans la loi des eaux mexicaines consacrait le droit de chaque citoyen, chaque homme et chaque femme mexicain d’avoir accès à l’eau potable, mais également à un “environnement sain pour son épanouissement et son bien-être”.

Mais le temps d’aller chercher le champagne au frais et d’aller voir d’autres nouvelles, et l’euphorie était passée.

Tout d’abord à Monterrey (voir l’historique ici), Nuevo León, où la construction d’un stade de football dans la réserve naturelle de la Pastora a bel et bien commencé. La rivière la Silla est amenée à être déviée de son lit et son affluent souterrain mis en tubes. Cette ineptie va rendre la zone du stade fortement inondable et, comme ce fut le cas le 11 octobre dernier, le parc zoologique sera sous les eaux à chaque pluie soutenue. De plus, la population de Guadalupe (municipalité abritant la Pastora) jadis à l’abri des sautes d’humeurs pluviométriques sera demain en première ligne devant les inondations.

Deuxièmement, dans l’État de México, la zone humide du Vaso Carretas et sa rivière attenante Remedios sont en voie d’assèchement afin de faciliter la construction d’une route nationale ; travaux incompréhensiblement validés par la SEMARNAT (SEcretaría del Medio Ambiente y de las Reservas NATurales) et la CONAGUA (COmmisión Nacional del AGUA).

Outre le fait que cette zone humide abrite une forte population d’oiseaux et par conséquent de reptiles, d’insectes, de poissons et de plancton, elle est essentielle à la régulation et à l’absorption des précipitations. L’eau, récupérée dans les zones humides par ruissellement, y reste et participe activement au remplissage des nappes phréatiques essentielles à la pratique de l’agriculture et à l’urbanisation, à la formation de sources un peu plus bas dans la vallée. Cette annonce est d’autant plus illogique que l’état de México a pâti cet été et ces dernières années de fortes inondations, le système de drainage et la mauvaise gestion urbanistique étant mis en cause.

Troisième exemple, la zone humide des Tembladeras, réserve naturelle protégée de l’État de Veracruz. Ici, le gouverneur de l’État, Fidel Herrera Beltran, s’est octroyé le droit de déclasser le site à une simple "zone urbaine constructible". Toujours aucune réaction de la CONAGUA et de la SEMARNAT. Proche de la ville de Veracruz, le bétonnage des Tembladeras fait courir le risque de voir les pluies d’automne déferler sur les zones urbaines et les inonder, ce qui est actuellement le cas dans l’État voisin de Tabasco où les villes touchées sont en priorité celles contruites sur des lagunes.

Enfin, dans un autre style, la construction du barrage El Zapotillo à Jalisco, futur garant de la consommation en eau des États de Jalisco et de Guanajuato. L’idée de concentrer toutes les eaux de ruissellement de la vallée pourrait sembler une bonne idée, cependant, et le fait a été souligné par le spécialiste Pedro Arrojo, l’investissement fourni pour la construction de l’édifice devrait plutôt être mis à disposition pour la réparation des fuites du réseau de canalisations déjà existant. La construction du barrage n’a aucun sens si une majorité de l’eau est perdue lors de son trajet jusqu’aux habitations ; profiter ainsi du surplus d’économies en préservant les zones humides afin de récupérer les eaux d’infiltration et retrouver des nappes phréatiques utilisables pour la cité. À ces problèmes techniques s’ajoutent de véritables drames humains puisque les habitants des villages se trouvant sur les terrains des barrages seront “redirigés”.

On y a cru, un instant, pas assez long pour être fortement déçu, mais bien assez pour confirmer l’outrageux manque de responsabilité et de vision à long terme des dirigeants mexicains, et surtout du manque de compétence des spécialistes SEMARNAT et CONAGUA qui n’a d’égal que leur manque de courage.

EN SAVOIR PLUS
 Biodiversité des zones humides de l’état de México : http://redalyc.uaemex.mx/redalyc/ht...
 Site du collectif pour la défense de la Pastora : http://www.sialestadioperoentrolado.org
 Rencontre “Rivières pour la vie” 2011, à propos du Zapotillo : http://cdhal.org/es/videos/rivieres-vie-zapotillo

SOURCES
 http://sintesis.cemda.org.mx/artman2/publish/desarrollo_costero/Quitan_protecci_n_a_humedales_en_Veracruz.php
 http://agua.org.mx/index.php?option=com_content&view=article&id=18323:humedal-ribereno-del-rio-de-los-remedios-danado-por-la-construccion-de-la-carretera-remedios-ecatepec-&catid=1009:foto-denuncia&Itemid=157
 http://www.yucatan.com.mx/20110929/nota-13/180237-aprobado-el-agua-un-derecho-constitucional.htm
 http://mexico.cnn.com/nacional/2011/09/05/mexico-40000-damnificados-por-lluvias-e-inundaciones-asegura-gobierno
 http://www.youtube.com/watch?v=XDbpUf_ow-Y

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