Financer l’eau et l’assainissement. La réponse des femmes de Kwaho (Kenya)

L’organisation Kenya Water for Health Organization (KWAHO) met en œuvre des projets d’accès à l’eau et à l’assainissement à travers la création de micro-entreprises locales et la mobilisation de l’épargne des communautés.

Contexte et enjeux

Au Kenya, l’eau n’est qu’une priorité parmi d’autres : éducation, inflation, urbanisation, agriculture, etc. Les personnes et organisations qui se soucient de développement tentent d’aider les communautés à sérier leurs priorités et à trouver les moyens d’atteindre leurs objectifs, en tenant compte de la faiblesse de leurs ressources. L’action de Kenya Water for Health Organization (KWAHO) se situe dans ce cadre.

Description de l’action

À Bungoma et Meru (districts de Tala et Tavata), l’action a été menée avec les communautés de base. KWAHO les a aidées à réaliser leurs objectifs en participant à l’action et en la planifiant.

Un fonds de roulement finance les travaux. L’aide extérieure ne représente que 10 % du fonds. La communauté doit fournir le reste. Un comité de gestion du fonds a été créé, les femmes y jouent un rôle significatif. Ce comité définit notamment la participation financière de chacun.

Un technicien de KWAHO aide à la construction de citernes de 2 500 litres, au remplacement ou à l’amélioration des toilettes et à doter les habitations de gouttières.

Historique

Organisation de femmes, KWAHO a vu le jour en 1976 à l’occasion de la décennie de la femme lancée par les Nations Unies en 1975. Financée par l’Unicef à ses débuts, KWAHO devint par la suite une organisation non gouvernementale (ONG). Son action s’inscrit dans le cadre de celle de l’État kenyan pour fournir eau et assainissement à la population à l’horizon 2000. KWAHO est reconnue pour son action au plus près des populations.

Objectifs

Le projet vise à doter chaque foyer d’un réservoir familial, à améliorer les latrines, à poser un toit en métal et des gouttières. Plus largement, l’objectif est d’encourager le développement de toute activité générant un revenu. La mobilisation des femmes constitue également un enjeu essentiel.

Résultats obtenus

La communauté s’est approprié le projet. Huit cents à mille femmes y participent. Elles le dirigent, en tiennent la trésorerie et la comptabilité avec efficacité. La cotisation mensuelle au fonds de roulement s’élève à 100 KShs (8 FF) mais peut varier d’un groupe à l’autre. Les cotisations couvrent quasiment l’ensemble des besoins. La communauté a établi elle-même les règles s’appliquant aux mauvais payeurs. Par exemple, dans le cas où les participants manquent d’argent, le troc s’y substitue.

Grâce au système qui permet de récupérer plus d’eau de pluie que nécessaire, les participants peuvent cultiver des potagers familiaux et améliorer leur alimentation.

Problèmes rencontrés

Les hommes ont manifesté une certaine hostilité au projet.

Leçons à tirer de l’expérience

A partir du moment où elles sont convaincues du bien fondé d’un projet, les communautés feront tout pour qu’il réussisse. C’est pourquoi elles doivent se l’approprier, en sachant impulser la dynamique tout en restant en retrait.

Par ailleurs, pour concevoir des projets plus réalistes, la recherche appliquée doit davantage tenir compte des cultures et des valeurs locales, ainsi que de la dégradation des conditions économiques. Les intervenants doivent connaître les langues vernaculaires et utiliser des outils visuels propres aux régions où ils travaillent.

Perspectives

Cette action a gagné une grande popularité et pourrait s’étendre à l’ensemble du Kenya. Elle prouve qu’il n’y a pas d’autre choix que d’élaborer les projets en collaboration totale avec les communautés. Celles-ci ont appris à réduire l’aide extérieure au minimum en assumant une grande partie des coûts. Elles peuvent donc s’approprier l’action et l’inscrire dans la durée.

Source

Fiche parue dans : L’eau et la santé dans les quartiers urbains défavorisés, Paris, GRET, 1994.

Contact : Mme Margaret Mwangola, directrice de Kenya Water for Health Organization (KWAHO), P.O. Box 61470, Nairobi (Kenya). Tél : (254-2)55 75 50. Fax : (254-2)54 32 65.

Commentaire (Olivier Petitjean, 2008)

Kenya Water for Health Organization poursuit ses activités et est notamment active dans le bidonville de Kibera, en marge de la capitale Nairobi (devenu brièvement le centre d’attention de la presse mondiale durant les affrontements politiques qui ont secoué le pays début 2008). L’association cherche à y remplacer le système actuel d’accès à l’eau par l’intermédiaire de revendeurs, qui font payer la ressource au prix fort en profitant de la dépendance de la population à leur égard. KWAHO s’efforce de mettre en place des collectifs de femmes capables de se substituer à ces revendeurs en achetant directement l’eau à la compagnie municipale (comme le font les revendeurs eux-mêmes), en l’acheminant dans des réservoirs grâce à un tuyau raccordé au réseau principal (qui passe juste à la limite du bidonville), et en la revendant à un prix raisonnable au niveau de leur voisinage. KWAHO mène aussi des actions de sensibilisation à l’hygiène et d’amélioration de l’assainissement, notamment en promouvant la désinfection solaire (voir le texte La purification de l’eau par le soleil).

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