Un processus de participation populaire, surtout féminine, mis en oeuvre par le Mouvement Indonésien de Protection Familiale pour l’amélioration de l’approvisionnement en eau obtient des résultats très significatifs, tant sur le plan de la gestion du projet par les habitants eux-mêmes qu’en ce qui concerne la place plus importante prise par les femmes.
Il s’agit d’une expérience de participation populaire – essentiellement féminine – à un projet mené par le Mouvement indonésien de protection familiale de 1985 à 1988 dans la province de Nusa Tenggara Timur, en Indonésie.
Une étude préalable ayant montré le peu d’intérêt de la population pour l’amélioration de l’approvisionnement en eau et le sentiment d’infériorité des femmes par rapport aux hommes, le Mouvement a défini des méthodes pour obtenir la participation des femmes sans pour autant s’aliéner les hommes et pour associer les villageois sans que les notables puissent se sentir menacés. On a indiqué aux villageois que le Mouvement ne venait pas proposer son propre programme mais souhaitait les aider à se doter du leur, qu’il disposait de peu d’argent, que les femmes, traditionnellement chargées de l’eau à la maison, devaient prendre l’initiative de cette activité par la création de « groupes d’usagers de l’eau » qui prendraient les décisions, le Mouvement se contentant de fournir des informations et d’être le relais avec les organismes techniques.
À la mi-1987, vingt-cinq groupes d’usagers de dix à soixante-quinze ménages étaient constitués dans quatre villages. Ils ont fourni plans des ouvrages, matériaux locaux, espèces, main d’œuvre, ciment, tuyaux. Ils se sont engagés à entretenir les ouvrages terminés. Avec l’assistance de techniciens du ministère de la Santé, ils ont créé, remis en état ou amélioré quarante-deux points d’eau. Planificateurs et techniciens ont apprécié les économies de dépenses d’équipement et de frais d’entretien qui ont résulté de cette approche.
À la mi-1987, 65 % de la population utilisaient les sources améliorées. La consommation d’eau avait progressé, utilisée pour la cuisine, le lavage ou l’arrosage des potagers. À la fin 1988, tous les ouvrages installés et réparés fonctionnaient. La plupart des usagers avaient acheté des pièces détachées sur le marché libre et procédé à des réparations. Un fonds d’entretien avait été créé, alimenté par des versements mensuels de 100 à 500 roupies (0,06 à 0,30 $US) par ménage. Courant 1988, trois groupes avaient ouvert des comptes bancaires et huit avaient dépensé plus de 100 000 roupies (60 $US) pour leurs ouvrages.
Les méthodes utilisées ont donné aux femmes des possibilités, une formation et un cadre qui leur ont permis de s’exprimer, de faire l’expérience de la responsabilité, de prendre l’habitude de diriger. Les statistiques obtenues grâce à deux cent quarante entretiens conduits en 1987 ont montré qu’elles avaient joué un rôle important dans les groupes d’usagers et que 76 % d’entre elles en faisaient partie (et 62 % des hommes). Elles ont choisi d’utiliser une partie du temps gagné grâce à l’amélioration de l’accès à l’eau pour chercher plus d’eau et cultiver ainsi davantage de légumes pour la consommation des ménages et la vente, améliorant ainsi leur situation économique. On a également constaté un net déclin des maladies diarrhéiques et des maladies de peau.
La plupart des villageois interrogés ont attribué le succès des groupes d’usagers de l’eau au fait que la population avait pu participer au projet. En deux ans, le projet a donné aux femmes un sentiment de fierté, de confiance en elles et de compétence qui leur a permis d’affronter de nouveaux défis. De plus il a été à l’origine d’une puissante aspiration au développement dans d’autres domaines.
SOURCE
– Article de Deepa Narayan-Parker paru dans Forum mondial de la santé, °3, 1990, p. 357-367.