Le canal Mer Morte-Mer Rouge est-il la solution pour régler les problèmes de rareté et de conflits de l’eau entre Israël, Palestine Jordanie ?

En décembre 2013, Israéliens, Palestiniens et Jordaniens ont signé un accord tripartite, sous l’égide de la Banque mondiale, en vue de la construction d’un canal destiné à relier Mer Morte et Mer Rouge, afin de remédier à la surexploitation de la première. Un mégaprojet dont on peut douter qu’il contribuera réellement, comme le prétendent ses promoteurs, à résoudre les problèmes liés à la rareté des ressources en eau dans la région - et encore moins à apporter l’eau et la paix aux Palestiniens.

Salué en fanfare par la presse mondiale lors de sa signature, l’Accord tripartite porte sur un montant de 650 millions d’euros. Le canal est prévu pour être achevé à l’horizon 2020.

Le nouveau magazine Orient XXI consacre un article approfondi au projet et aux critiques qui lui sont adressées, notamment par les écologistes de Friends of the Earth Middle East (FoEME) - une organisation qui a toujours été trinationale entre Israéliens, Palestiniens et Jordaniens.

La Mer Morte voit son niveau s’abaisser rapidement du fait du climat, mais aussi et surtout de la surexploitation des eaux du Jourdain (par Israël, mais aussi, en amont du bassin versant, par la Syrie et la Jordanie) et de celles du lac lui-même (usines de potasse et d’extraction de minéraux). Elle baisse d’un mètre par an et a déjà vu sa surface réduite d’un tiers.

Présenté comme la solution miracle aux conflits du Proche-Orient, le projet de Canal ’Dead-Red’ est en fait surtout porté par les intérêts économiques israéliens et jordaniens (sans parler de ceux des entreprises qui se verront confier la réalisation et la gestion du projet). L’eau de la Mer Rouge sera acheminée sur 200 kilomètres dans un canal souterrain (sur territoire jordanien), grâce à la construction de deux centrales hydroélectriques. Elle sera ensuite traitée dans des unités de dessalement (à construire), pour alimenter les populations palestiniennes et jordaniennes et de nouvelles unités agricoles irriguées en Israël. Inutile de dire qu’il ne résoudra en rien la question sous-jacente de la reconnaissance du droit à l’eau des Palestiniens.

FoEME - dont un représentant a qualifié le projet de « simple project classique de dessalement, mais avec une dimension régionale » - craint que le canal n’entraîne une dégradation encore plus sérieuse de la qualité des eaux de la Mer Morte, sans stabilisation de son niveau. Les propositions de l’ONG, centrées sur la réduction des extractions d’eau en amont et une meilleure régulation des activités industrielles sur les rives de la Mer Morte, sont restées lettre morte.

Sur le sujet, lire aussi cet article du New York Times : A Rare Middle East Agreement, on Water

Olivier Petitjean

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Photo : CC

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